Crise dans les Médias : La CAP sonne l’alerte face à une dérive autoritaire


Dakar, le 29 avril 2025 récit infosdujour

La Coordination des Associations de Presse (CAP) a lancé, ce mardi, un vibrant appel à la mobilisation du secteur médiatique sénégalais. Lors d’une conférence de presse tenue dans un climat de grande inquiétude, la CAP a dénoncé les « assauts répétés » que subit la presse nationale depuis mai 2024. Des mesures jugées arbitraires, prises par le ministère de la Communication et exécutées notamment par la Direction de la Surveillance du Territoire (DST), menacent aujourd’hui l’existence de plusieurs centaines de médias.

Une campagne d’asphyxie dénoncée

Dans son communiqué, la CAP fustige une asphyxie financière prolongée, orchestrée par l’État, suivie d’un durcissement sans précédent. Le point culminant est survenu avec l’arrêté ministériel du 22 avril 2025 et les assignations adressées par la DST à des entreprises de presse jugées « non conformes » au Code de la presse. Plus d’une vingtaine de responsables de médias ont déjà été convoqués, et entre 200 et 300 entreprises pourraient être concernées dans les jours à venir.

Pour la CAP, cette opération dépasse le cadre légal. « La presse sénégalaise est criminalisée de manière illégale », clame le collectif, qui rappelle que la Cour suprême a été saisie depuis octobre 2024 sans qu’aucune décision n’ait encore été rendue.

Des failles juridiques et un climat de peur

La CAP pointe de nombreuses irrégularités dans le processus de « régulation » : absence de notification officielle pour les médias rejetés, flou autour de la liste des entreprises reconnues, fermeture inexpliquée de la plateforme d’enregistrement, et aucune possibilité de recours ou d’appel. Un fonctionnement que la coordination n’hésite pas à comparer à celui d’un tribunal d’exception.

Pire encore, la CAP estime que ces manœuvres visent à instaurer un climat d’autocensure. « Beaucoup de rédactions vivent dans l’incertitude la plus totale », affirme le collectif, dénonçant un mépris pour les règles élémentaires de transparence administrative.

Une presse privée d’oxygène

La CAP décrit une presse sénégalaise étouffée, comparée symboliquement à « un George Floyd », en référence au tragique symbole de répression policière. Depuis mai 2024, une circulaire du Premier ministre aurait conduit à la rupture de plusieurs contrats entre médias et institutions publiques, aggravant la précarité du secteur. En parallèle, les mécanismes de soutien tels que le Fonds d’Appui et de Développement de la Presse (FADP) sont à l’arrêt, et les organes de régulation comme le CNRA, le CORED ou la Commission de la carte de presse sont paralysés.

Un plan d’actions et une riposte organisée

Face à cette situation, la CAP ne compte pas rester silencieuse. Un formulaire est désormais disponible pour recenser les médias déclarés non conformes et organiser leur défense juridique. Tous les responsables sont appelés à déposer un recours individuel auprès de la Cour suprême.

Par ailleurs, une série de rencontres est prévue tout au long du mois de mai, en partenariat avec les syndicats, les patrons de presse, la société civile et les défenseurs des droits humains. Ces actions culmineront avec un sit-in devant le ministère de la Communication. La CAP prévoit également une restructuration interne et une assemblée générale le 17 mai pour formaliser ses nouvelles orientations.

Une presse en lutte pour sa survie

Alors que le Sénégal se targue d’être un modèle démocratique, le traitement réservé à ses médias fait aujourd’hui craindre un recul dangereux de la liberté de la presse. La CAP appelle donc toutes les forces vives de la Nation à se mobiliser : « Ce qui est en jeu, c’est la survie d’un pilier fondamental de notre démocratie. »

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