Falilou Keïta, directeur général de la Caisse des dépôts et consignations (CDC), a annoncé une mesure qui fait déjà polémique. Dans un entretien accordé à Seneweb, il a révélé que l’État prépare un mécanisme obligeant les locataires à verser leur caution directement à la CDC, et non plus aux bailleurs. L’objectif affiché : instaurer plus de transparence et mieux protéger les droits des locataires.
Une avancée pour certains acteurs du secteur
Pour Momar Ndao, président de la Commission de régulation des loyers, cette réforme constitue une avancée significative. Selon lui, la CDC jouerait un rôle de tiers de confiance, garantissant la restitution des cautions en fin de bail et évitant aux propriétaires de devoir immédiatement rembourser des sommes parfois importantes lors des départs.
Il souligne également un enjeu fiscal important : « Beaucoup de bailleurs échappent encore à l’impôt. Ce système permettra de les identifier et de rendre visible leur activité économique », a-t-il déclaré dans L’Observateur.
Des locataires partagés et des zones d’ombre
Si certains locataires se montrent favorables à l’initiative, d’autres expriment des inquiétudes. Me Bassirou Sakho, vice-président de l’Association de défense des locataires du Sénégal, soulève plusieurs interrogations : « Que se passe-t-il concrètement à la fin du contrat ? Qui décide de la restitution ? Et comment gérer les baux oraux, très fréquents au Sénégal ? »
Il plaide pour un dispositif simple, accessible à tous, notamment en tenant compte du fort taux d’analphabétisme et du faible accès aux ressources juridiques pour une grande partie de la population. Il rappelle également que, juridiquement, un bailleur peut refuser ce mécanisme : « En matière contractuelle, les parties sont libres. Un propriétaire peut tout simplement refuser de louer. »
Un rejet ferme du côté des bailleurs
Les propriétaires, eux, s’opposent frontalement à cette réforme. Ibrahima Ndiaye, président de l’Association des bailleurs du Sénégal, se montre catégorique : « C’est hors de question. Si la CDC a besoin d’argent, qu’elle cherche ailleurs, pas dans les cautions des bailleurs. »
Il dénonce une pression accrue sur une profession déjà fragilisée par les impayés, les litiges et un manque de soutien de l’État. « Les bailleurs sont constamment diabolisés, alors qu’ils investissent dans leur pays. Quand un locataire part sans payer, il est souvent impossible de récupérer les sommes dues. »
Une pression fiscale en toile de fond
Autre sujet de tension : la fiscalité. Ibrahima Ndiaye affirme que depuis l’alternance politique, les bailleurs sont davantage ciblés par l’administration fiscale. En 2024, son association aurait enregistré 111 redressements fiscaux, représentant plusieurs milliards de francs CFA.