Scandale aux ICS: 103 chauffeurs dénoncent l’exploitation et fraude


Récit infosdujour

Un véritable séisme social secoue les Industries Chimiques du Sénégal (ICS). 103 chauffeurs, employés depuis plus de six ans sans contrat, sans protection sociale et sans paiement des impôts sur leurs salaires, viennent de se voir brutalement licenciés après avoir réclamé leurs droits. Une affaire explosive qui met en lumière des violations flagrantes du Code du Travail et des lois fiscales sénégalaises.

Des travailleurs invisibles depuis 2018

Depuis plus de six ans, ces chauffeurs ont assuré le transport des produits ICS avec des camions appartenant à l’entreprise. Pourtant, aucun d’entre eux n’a jamais signé de contrat de travail, en violation de l’article L. 64 du Code du Travail. Selon la loi, tout employé occupant un poste depuis plus de trois mois sans contrat écrit doit être considéré comme titulaire d’un Contrat à Durée Indéterminée (CDI).

« Pendant des années, nous avons travaillé comme des employés à part entière, avec des horaires stricts et des consignes directes de l’entreprise. Mais sur le papier, nous n’existions pas », témoigne l’un des chauffeurs concernés.

Privés de couverture sociale et fiscale

Cette absence de formalisation contractuelle a eu des conséquences dramatiques. Aucun des chauffeurs n’a été affilié à la Caisse Nationale de Sécurité Sociale (CNSS) ni à une Institution de Prévoyance Maladie (IPM), les privant ainsi de cotisations pour la retraite et de couverture en cas de maladie ou d’accident.

« Un jour, j’ai eu un accident de la route en livrant un chargement pour ICS. J’ai dû payer mes soins moi-même, car nous n’avions aucune assurance », confie un autre chauffeur. Une violation manifeste de l’article L. 209 du Code du Travail, qui impose à l’employeur d’assurer la prise en charge médicale de ses salariés.

Mais ce n’est pas tout : en plus d’avoir contourné ses obligations sociales, ICS aurait aussi omis de prélever et reverser l’Impôt sur les Salaires (ITS), un manquement qui enfreint l’article 171 du Code Général des Impôts. Cette fraude pourrait représenter plusieurs millions de FCFA de manque à gagner pour l’État sénégalais.

Un licenciement abusif et arbitraire

En février dernier, la situation a basculé. Les chauffeurs, excédés par leurs conditions de travail précaires, ont demandé des équipements de protection individuelle (EPI), indispensables pour leur sécurité. La réponse d’ICS a été brutale : un licenciement collectif sans préavis, sans notification écrite et sans indemnisation.

Un acte illégal, contraire aux articles L. 63 et L. 67 du Code du Travail, qui imposent une procédure claire et des compensations financières en cas de rupture de contrat.

Une bataille judiciaire en vue

Désormais, ces travailleurs se tournent vers la justice pour faire valoir leurs droits. Ils réclament :

•La reconnaissance de leur statut en CDI,

•La régularisation de leurs cotisations sociales,

•Le remboursement de leurs frais médicaux,

•Le paiement des impôts et indemnités dus.

Ils interpellent l’Inspection du Travail, la CNSS, la Direction Générale des Impôts et le Tribunal du Travail de Thiès afin que des sanctions soient prises contre ICS et que leurs droits soient rétablis.

Cette affaire soulève des questions fondamentales sur le respect du droit du travail au Sénégal. L’État laissera-t-il une multinationale bafouer impunément les lois en vigueur ? Cette lutte des chauffeurs d’ICS pourrait bien devenir un test décisif pour la protection des travailleurs et la lutte contre la fraude sociale et fiscale dans le pays.

Haut